Penser au-delà du bruit et de la fureur.

Dans un pays où tous semblent parler en même temps, le vrai courage est peut-être de savoir se taire un moment pour penser.
J’avais arrêté ce blog depuis plus d’une année. J’ai pris le temps d’écouter, d’échanger, de regarder ce pays et de sentir son cœur battre.

Dans un pays où tous semblent parler en même temps, le vrai courage est peut-être de savoir se taire un moment pour penser.

J’avais arrêté ce blog depuis plus d’une année. J’ai pris le temps d’écouter, d’échanger, de regarder ce pays et de sentir son cœur battre. 

Le Sénégal est à l’image de ce baobab majestueux, plusieurs fois centenaire sur l’ile de Dionewar sur les berges du Saloum qui regarde le tumulte du monde tel le fleuve qui coule à ses pieds.

Le vacarme des jours

Il y a des moments où le Sénégal ressemble à une place publique sans fin.

Tout le monde parle, s’indigne, commente, prophétise.

Les bourreaux d’hier qui essaient de se faire passer pour des victimes.

Ceux qui se sont gavés d’argent public et ingurgiter jusqu’à plus soif veulent apparaître comme des martyrs aujourd’hui. L’incarcération à Rebeus apparaît comme la summum du déshonneur. Passe encore le pavillon spécial des malades incarcérés mais la prison, non pas la prison pour eux. 
Alors les plateaux télé qu’ils continuent de biberonner débordent, les réseaux sociaux alimentés brûlent, les conversations s’enflamment au moindre mot.
Le bruit est partout — un bruit qui ne laisse plus respirer la pensée et le discernement.

On ne cherche plus à comprendre, mais à réagir, même pour les acteurs les plus avisés et pas dupes.
Chacun veut avoir raison, tout de suite, bruyamment.
Et pourtant, plus le bruit augmente, plus le sens s’éloigne.
On confond la passion avec la profondeur, l’indignation avec la lucidité.

La démocratie, elle, demande autre chose : du recul, de la lenteur (du temps), du discernement.

La fureur et ses blessures

Sous le bruit, il y a la fureur.
Une fureur qui n’est pas seulement politique : elle est sociale, générationnelle, existentielle.
C’est la colère d’une jeunesse brillante, impatiente, ouverte au monde, mais bloquée, instruite mais sans espace, connectée mais frustrée.
C’est aussi la fatigue d’un peuple qui travaille dur, mais qui ne voit pas toujours le fruit de son effort.

La vie chère, l’insécurité, la récession économique qui s’installe insidieusement, anéantissent les espérances soulevées par la victoire de Ousmane Sonko et Diomaye Faye.

Cette fureur est juste.

Et c’est elle qui a posé les prémisses de la révolution démocratique en cours.
Mais elle devient dangereuse quand elle n’a plus d’horizon, quand elle n’est plus orientée par une pensée.
Elle peut se transformer alors en spirale, en déferlement. Et au lieu de bâtir, elle peut tout brûler comme l’expérience et l’histoire des révolutions dans le monde nous en ont donné souvent une illustration.

Revenir à l’essentiel : penser

Penser au-delà du bruit et de la fureur, c’est un acte presque spirituel.
C’est refuser de se laisser happer par le tumulte du moment pour revenir à ce qui dure.
C’est s’asseoir, observer, écouter — non pour fuir, mais pour comprendre.

Le Sénégal a toujours su le faire.
Nos traditions sont souvent des écoles de pensée.
On y apprend que parler ne suffit pas : il faut chercher le vrai mot, celui qui apaise et éclaire.

Penser, ce n’est pas se taire : c’est parler autrement.

Et pour reprendre la formule de Lénine : là où il y a une volonté, il y a un chemin.

L’éthique du discernement

Le vrai enjeu du Sénégal n’est pas seulement institutionnel, mais intérieur.

Pastef n’a pas engendré la révolution démocratique actuelle comme le démiurge qui façonne l’univers à partir d’un chaos préexistant, en s’inspirant des formes intelligibles et éternelles pour créer un monde ordonné et beau.

Ousmane Sonko n’essaie pas de créer le monde à partir de rien (ex nihilo), mais organise une matière désordonnée, introduisant un ordre par la proportion et la raison. C’est du moins de ce que j’ai compris de ses déclarations et de ses écrits.

Elle sourd depuis de nombreuses années, de la contestation du vol des deniers publics, de la gabegie qui a régné dans les hautes sphères des pouvoirs passés.

Elle sourd depuis les 12 ans au pouvoir Abdoulaye Wade, qui a réduit à néant notre culture des règles de la bonne administration publique, de l’Etat de droit, au profit de coteries familiales et financières. Et a engendré le retour du refoulé du pouvoir ceddo ou ce que le professeur Mamadou Diouf appelle le modèle islamo-wolof de l’Etat.

Elle sourd après la poursuite du wadisme sans Wade, avec la mise en place par Macky et les siens de la gestion clanique et mafieuse de l’Etat, prêts à tout pour piller et massacrer sans remords toutes contestations.

Nous avons besoin d’une éthique du discernement.
D’apprendre à distinguer l’émotion de l’information, la critique de la haine, la conviction du fanatisme.

Il faut remettre la pensée, l’éducation, la culture au centre du débat national.
Non pour créer une élite qui parle seule, mais pour reconstruire un langage commun,
où la parole retrouve sa valeur.

En somme, l’objectif de la révolution démocratique en cours est de « faire Nation », c’est-à-dire continuer à créer un sentiment d’appartenance commune chez tous les citoyens de ce pays, en renforçant le sentiment d’une destinée et d’une solidarité partagées.

Cela passe, par la construction de liens sociaux forts et la mise en place des conditions d’équité, de justice et de confiance entre les citoyens que nous sommes.

Et la clarté morale est une forme de courage politique. C’est ce que résume à mon sens la formule : Jub, Jubal, Jubanti. Des concepts moraux wolof qui veulent simplement traduire ces valeurs : transparence, justice, redressement.

Penser, c’est aimer le pays

Penser, dans ces temps troublés, c’est résister à la banalité du mal en refusant de suivre le courant comme le dit Hannah Arendt.

Le mal étant ce sentiment dans lequel les épigones de Wade (Macky et les siens) veulent plonger ce pays.

A l’aide des méthodes démoralisantes qui transforment les citoyens pensants en automates, ils veulent tuer la volonté des citoyens, le caractère, la dignité. La coterie gouvernante balayée en mars 2024, a su devenir grâce aux milliards détournés, une petite oligarchie qui se veut, même masquée, inamovible et inviolable.
Le bruit passera.
La fureur aussi.
Mais ce qui restera, c’est la qualité de notre regard collectif — notre capacité à dire :voilà où nous voulons aller ensemble.

Ce pays a besoin de citoyens qui écoutent avant de répondre, de leaders qui pensent avant de parler, et d’une jeunesse qui croit que le silence, parfois, est plus fort que le cri.

Parce qu’au fond, penser au-delà du bruit et de la fureur, ce n’est pas s’éloigner des réalités du Sénégal : c’est apprendre à le voir tel qu’il est — pour mieux le transformer.

Une fête de l’instruction publique gâchée.

Que 100 écoles publiques rivalisent et s’épanouissent !!!
Seule l’école publique laïque garantit l’égalité des chances de tous les enfants de la République. Par la neutralité de l’enseignement et l’engagement absolu pour éduquer et former des citoyens libres, les enseignants de l’école publique sont nos héros quotidiens. Le gouvernement est attendu sur sa capacité à reconstruire le système public de l’éducation et pas d’ériger l’école privée catholique comme la voie exclusive de réussite scolaire des enfants.

Le tollé provoqué et les répliques successives par une partie des propos tenus par le Premier ministre lors de la remise des prix du concours général aura ruiné le message d’ensemble du président de la République et du premier ministre lui-même.

 C’était la fête de l’école, de l’éducation et de l’apprentissage de la science.

En substance, il s’agissait de mettre en exergue la valeur de l’instruction publique nationale au travers de ses brillants récipiendaires de toutes origines.

En écoutant bien les propos du premier ministre : « Certaines choses ne peuvent plus être tolérées dans ce pays. En Europe, ils nous parlent constamment de leur modèle de vie et de style, mais cela leur appartient. » On voit bien qu’il y a une erreur de contexte.

Rappelons qu’il répondait aux questions d’une jeune femme lauréate d’un concours de récitations de Coran à propos des daaras.  

La mauvaise querelle sur la laïcité des écoles confessionnelles catholiques.

L’Eglise catholique ne peut être le promoteur de la laïcité. Elle ne l’a pas inventée, ni au Sénégal, ni ailleurs.

La laïcité « européenne » ou française en particulier, puisque c’est de celle-là dont il s’agit s’est développée contre l’Eglise, accusée d’accaparement des consciences des enfants.

L’instauration de l’instruction publique, gratuite et laïque en France s’est faite contre la toute-puissance du clergé catholique à revendiquer sa compétence et sa prétention à former et éduquer tous les enfants.

A travers cette mauvaise querelle qui sévit depuis ces propos de Ousmane Sonko, nous sommes exactement en face d’un « double bind » ou double contrainte pour reprendre le concept de Gregory Bateson. En gros, une “double contrainte” est un type particulier de conflit qui crée une situation “non-gagnante” ; c’est-à-dire, une situation dans laquelle on est “damné si vous le faîtes et damné si vous ne le faîtes pas”.

Cela veut dire que le clergé catholique sénégalais se voit assigné à la défense d’une laïcité à la française qui ne le concerne en rien et qu’une frange importante de ses coreligionnaires français abhorrent.

Et le premier ministre semble ériger l’accès à ’école privée confessionnelle catholique comme étant la condition de la réussite scolaire pour les élèves sénégalais les plus brillants.C’est ainsi que je lis cette partie de son propos : « au Sénégal, nous ne permettrons plus à certaines écoles d’interdire le port du voile ». Se voulant plus clair, il a ajouté : « Gare à ces institutions qui refuseront d’accepter une fille simplement parce qu’elle est voilée. »

Mais pourquoi alors que les meilleures écoles publiques gratuites leur sont ouvertes et que c’est leur place naturelle ?

Eloge de l’école publique, gratuite et obligatoire

Je suis un enfant de l’école publique (primaire, secondaire et université), l’école de tous les enfants, ouverte, laïque, tolérante, avec ses enseignants-hussards dont le dévouement, la disponibilité totale, faisaient notre admiration. C’est l’école du brassage et de l’édification des citoyens sénégalais. Où on apprend à « faire Nation ». Où on s’ouvre aux autres, d’où qu’ils viennent et quelle que soit l’origine sociale des parents. C’est cette école que les pères bâtisseurs de notre Etat-Nation ont construite.

Léopold Senghor et Mamadou Dia et tous leurs compagnons avaient fait ce choix, qui est celui de l’avenir de notre Nation.

Tous les élèves du Sénégal de mon âge et les plus jeunes, parlent toujours avec beaucoup d’émotions des enseignants qui les ont marqués durant leur scolarité. Le ministre Guirrassy en a donné un témoignage l’autre jour en recevant son ancienne institutrice. Le premier ministre l’a illustré aussi dans une autre partie de son propos en parlant des enseignants qui l’ont encouragé à se discipliner pour ne pas rater ses études. Le parrainage de la cérémonie de remise des prix du concours général par le professeur Sangharé témoigne de la volonté des pouvoirs publics d’ériger l’instruction publique comme levier indispensable du développement de notre pays.

Mais alors, pourquoi cette fixation sur le voile ?

Pourquoi cette mauvaise querelle sur l’admission réelle ou supposée des élèves voilées dans les écoles, en l’occurrence des écoles catholiques, même si le premier ministre ne les cite pas ?

Le premier principe de la laïcité ou du sécularisme sénégalais est celui de la neutralité de l’espace scolaire public. Tout du moins, comme l’ont voulu les pères bâtisseurs de notre Etat-Nation.

Les convictions religieuses doivent rester à la porte de l’école publique. On se fiche de connaître la religion de tel ou tel camarade. On était de Blaise Diagne, de Van Vo ou Delafosse. Et une sorte de patriotisme scolaire se développait en sport, au hand, au foot ou au basket. On admirait les moyens que mettait l’encadrement de Saint Michel en sport. Mais on était ravi de les battre sur le terrain.

C’est le devoir des pouvoirs publics de construire des écoles publiques de qualité pour tous les enfants du Sénégal. Certes l’enseignement privé (confessionnel ou pas) est partie intégrante du système national d’éducation, mais il n’est pas destiné à tous les élèves. Alors que l’enseignement public est ouvert à tous. C’est de la responsabilité du gouvernement de le développer, le consolider et de l’étendre.

Les politiques d’ajustement structurel des années 80 ont démoli le système d’enseignement public : fin des programmes de construction (avec la honte absolue qu’a constitué jusqu’à aujourd’hui l’état de délabrement du lycée Limamou Laye de Guédiawaye malgré ses excellents résultats chaque année), arrêt des recrutements d’enseignants…

Que 100 écoles publiques rivalisent et s’épanouissent !!!

Du premier ministre j’attends l’annonce d’un programme de construction d’écoles publiques dans les grands centres urbains du pays et dans le monde rural. Je n’attends pas des propos sur l’exclusion réelle ou supposée d’élèves voilées des écoles catholiques et qui ne concernent en l’occurrence que quelques dizaines des filles et dont les parents ont suffisamment les moyens de leur trouver une place ailleurs. Ce qui est d’ailleurs le cas à chaque rentrée.

Le souverainisme économique et le développement de ce pays mérite que l’on évite ces mauvaises querelles et que l’on se concentre sur l’essentiel.

Pour reprendre le mot de Mamadou Diouf, une véritable révolution démocratique s’est enclenchée dans ce pays, une déconstruction-reconstruction de certains paradigmes est en route. Parmi celles-ci une prise de conscience citoyenne, jamais observée et à certains égards, comparable aux mobilisations pré et postindépendance.

J’ai prédit et écrit sur la raclée électorale qu’allait subir le régime corrompu de Macky. Et le résultat est au-delà des espoirs des démocrates et des républicains de ce pays et d’ailleurs.

Les premières décisions et l’allure générale des mesures arrêtées (à l’exception notable de la parité dans les nominations aux fonctions de direction publiques), la gestion maîtrisée des politiques publiques, annoncent des lendemains qui tranchent agréablement avec la fin de règne de Macky Sall et même de Wade.  Le renouvellement générationnel, les nouveaux talents et compétences et les pratiques du gouvernement constituent assurément de très agréables surprises.

Macky Sall, un sortant aux abois à la recherche d’une bouée de sauvetage

Un homme (et son clan) aux abois crie sa détresse et cherche secours pour une absolution de toutes ses fautes. Et il utilise les « autres », surtout les frustrés du parrainage, comme bouclier pour justifier « son dialogue ».

Un homme (et son clan) aux abois crie sa détresse et cherche secours pour une absolution de toutes ses fautes. Et il utilise les « autres », surtout les frustrés du parrainage, comme bouclier pour justifier « son dialogue ».

Un dialogue pour se sauver

Que n’a-t-il pas dialogué pendant 12 ans, ayant eu tout le temps et tous les pouvoirs pour ce faire ? Il a préféré réprimer, embastiller, mettre sous silence tout opposant (réduire à sa plus simple expression), sans autre forme de procès, sous les prétextes les plus fallacieux si ce n’est les plus loufoques : terroriste, salafiste, comploteur contre l’Etat, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste …

Craignant les retours de flamme après son départ du pouvoir, il a pensé s’auto-amnistier par une Loi en Conseil de Ministres, soumise au vote de l’Assemblée nationale … dans une période suspecte. Il a dû se raviser sachant que la ficelle était trop grosse.

Sa trouvaille : « le dialogue de 48 heures » pour que l’auto-amnistie passe à l’amnistie acceptée et « décidée » par consensus à l’issue des « 48H de Dakar ».

Tout acteur politique qui participerait à ce deal, frustré du parrainage ou inscrit sur la liste des candidats retenus par le Conseil constitutionnel, serait responsable de la plus grande forfaiture et d’une faute politique qui laissera une tache indélébile dans l’histoire de notre pays.

Aujourd’hui Il a besoin de vous pour dire au monde « ce n’est pas ma décision mais celle issue du dialogue national » (dialogue de fin de règne).

Macky SALL a fini son mandat. Il ne lui reste qu’une seule obligation qu’il tire de ses fonctions de président sortant : fixer par décret la date de l’élection comme il l’avait déjà fait en appelant le corps électoral le dimanche 25 février.  Il s’est ravisé tout seul avec des prétextes qu’il a lui-même jugés légers, en renouvelant sa confiance à celui qui est au centre des prétextes évoqués.

Que personne n’accepte pas de lui servir de faire valoir ou plutôt de « chair à canon ». La situation actuelle relève de sa seule et exclusive responsabilité et il n’a pas besoin de vous pour présider durant les derniers jours de son mandat.

Il a senti la terre se dérober sous ses pieds depuis sa décision honteuse décriée par tous les pays et partenaires du Sénégal et il craint de devenir un paria à travers le monde, persona non grata, risquant de ne plus être reçu par ses anciens homologues qui ont tous pris leur distance (il a parlé de campagne nauséabonde hier … c’est plutôt sa décision qui mérite ce qualificatif).

La suite, ce seront les campagnes de poursuites à travers le monde sur sa personne et ses proches pour les fortunes accumulées en 12 ans ou plus (car il y en a eu avant 2012) … c’est de ça qu’il a peur : vivre un cauchemar à partir du 3 Avril et la hantise jusqu’à la fin de ses jours alors qu’il voudrait plutôt jouir de ses biens accumulés sur le dos des Sénégalais.

Macky a peur et si Karim WADE souhaite se coaliser avec lui, libre à lui et ses suiveurs de se rendre aux 48H de Dakar et qu’ils assument tous les deux, les lamentables décisions qui s’y prendront.

Qu’ils prennent la responsabilité de rejeter eux-mêmes les décisions du Conseil Constitutionnel dont Macky SALL a lui-même rappelé qu’ils ne sont pas susceptibles de recours, lors de sa rencontre avec des candidats non retenus sur la liste arrêtée par le Conseil.

La décision du conseil constitutionnel une fierté

Le Sénégal a recouvré sa belle image d’un pays organisé et digne de sa réputation grâce aux décisions du Conseil Constitutionnel : notre nation dispose d’assez d’anticorps pour résister à ces attaques d’un sortant désespéré ou d’un apprenti sorcier qui a fait un parjure avéré.

Peu importe si Karim WADE a perdu sa nationalité française et en a apporté la preuve le 16 Javier 2024. Le fait est, qu’il a déclaré sur son « honneur » en 2019 puis en 2023 (deux fois de suite) qu’il était exclusivement sénégalais au moment de déposer sa candidature.

Il s’agit d’un parjure et le Conseil a justement fait le constat d’un faux dans sa déclaration sur « l’honneur ». Quel sens de l’honneur pour mentir deux fois de suite en 5 ans alors qu’on sollicite la confiance du peuple ?

Ces deux-là, ne valent pas que vous mettiez vos mains dans la fange et ternissiez à jamais votre image. Vous seriez définitivement classés parmi les renégats et traitres à leur nation. Vous n’en tireriez aucun avantage, ni profit.

Le Monde entier ouvre les yeux sur le régime de Macky Sall en ce moment et le classe parmi les apprentis dictateurs.

Nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes : il avait le choix de laisser les Sénégalais voter le 25 février et choisir le Président pour les 5 années à venir.

En 2012, il s’est installé en s’engageant à lutter contre la corruption et l’enrichissement illicite (ce qui n’a strictement rien donné, encore moins influé sur 12 ans de mauvaises pratiques dans ces domaines) … aujourd’hui il veut s’en aller en ayant notre absolution.

De grâce ne tombons pas dans le piège. Laissons-le sortir tout petit et saluons la grandeur de notre très Beau Sénégal.

« Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ».  Pour ceux qui serez sensibles aux appels des sirènes du palais.

Vous serez bien inspirés de vous en tenir strictement à la décision du Conseil constitutionnel et de refuser les appels mal venus de personnes qui ne veulent pas votre bien ni celui du Sénégal mais seulement le leur. Le Conseil a retenu une liste de candidats ; et à la surprise de tous un candidat encore incarcéré. De grandes manœuvres sont engagées le visant pour lui tendre la main. Il faut refuser ces tentatives de manipulation de dernières minutes. Il ne devra son élargissement qu’au Peuple et non à ces comploteurs. Ce régime a eu 12 ans pour tendre la main et vous associer à la gestion du pays, ils ont préféré vous diaboliser.

La face hideuse d’une fin de mandat.

On pensait avoir tout vu des agissements et des manœuvres de ce régime finissant, mais dissoudre PASTEF, envoyer au bagne emprisonner son chef après la rafle de ses cadres, démanteler de façon chirurgicale ce parti et obliger Khalifa Sall, ce pauvre Barthélémy Diaz et Karim Wade à aller à Canossa a montré aux citoyens de ce pays et au monde entier que ce régime est prêt à tout.
Il a largué les amarres et vogue vers des rivages d’un totalitarisme inconnu dans ce pays depuis plus de 40 ans.

On pensait avoir tout vu des agissements et des manœuvres de ce régime finissant, mais dissoudre PASTEF, envoyer au bagne emprisonner son chef après la rafle de ses cadres, démanteler de façon chirurgicale ce parti et obliger Khalifa Sall, ce pauvre Barthélémy Diaz et Karim Wade à aller à Canossa a montré aux citoyens de ce pays et au monde entier que ce régime est prêt à tout.

Il a largué les amarres et vogue vers des rivages d’un totalitarisme inconnu dans ce pays depuis plus de 40 ans. 

Les livres d’histoire diront retiendront que c’est durant le régime de Macky Sall, que la police et des nervis ont osé tirer sur la population faisant plusieurs dizaines de morts.

On se souviendra que c’est sous son régime que plus 700 manifestants ont été raflés enfermés par ses séides.

L’histoire notera que c’est sous son régime que la prévarication, le détournement des deniers publics, la gabegie et l’impunité pour leurs auteurs auront atteint un niveau jamais vu (sauf sous son maître, Wade) sous nos horizons

Ce régime n’agit pas par convictions, parce qu’il n’en a pas.

Il agit au gré d’emprunts et toujours vers les extrêmes. Parce qu’il pense avec ses muscles.

Le Président et son clan de « katangais », mènent cette Nation à une banqueroute économique, sociale et morale complète.

On se souviendra de Macky Sall, comme d’un petit président.

Un bonapartisme sénégalais.

Nous le constatons depuis 12 ans, ce régime n’est pas capable d’assurer au peuple sénégalais, ni la lutte contre la misère sociale, ni le développement économique, ni le respect des libertés publiques.

C’est précisément, la raison pour laquelle, ils ne peuvent supporter plus longtemps l’ordre démocratique, avec les contestations, les manifestations, les interpellations des citoyens et de l’opposition. Ils sont contraints d’écraser les citoyens et surtout la jeunesse par la violence et la répression inouïe.

Le régime sait qu’il ne peut pas faire marcher l’armée contre le peuple sénégalais, parce qu’il sait que très souvent dans ces situations, cela s’achève par le passage d’une grande partie des soldats du côté du peuple.

Dans l’histoire politique dans beaucoup de pays, c’est la raison qui conduit à la création de bandes armées particulières (nervis) nourries, payées et dressées contre le peuple, comme certaines races de chiens sont dressées contre le gibier.

Ce régime est celui d’un homme arrivé au pouvoir par un heureux concours de circonstances.

Je crois à certains égards que l’on peut parler d’une tentation de Macky Sall à un « bonapartisme sénégalais » dans sa propension à vouloir incarner à lui seul, la nation sénégalaise contre tous les autres.

Puisqu’il les considère tous, de Khalifa Sall en passant par Karim Wade, (tous les deux passés par la case prison) et Ousmane Sonko comme des ennemis de l’Etat, que lui seul représente.

Il se méfie des corps intermédiaires, syndicats, organisation des droits de l’homme et autres associations, des confréries religieuses, de l’Eglise catholique, de tous les pouvoirs locaux, tous émanant de la société civile sénégalaise.

Ce régime d’ordre qui promet la paix civile, au moyen d’un pouvoir qu’il veut fort et actuellement extrêmement policier, ne fait aucune confiance aux revendications démocratiques des citoyens et montre une indifférence aveugle aux aspirations des jeunes sénégalais.

Il n’y a pour lui qu’une seule chose importante, rester au pouvoir, protéger son clan et sa famille, des enquêtes et audits à venir sur sa gestion.

Dans la soudaineté de ses décisions, le cynisme sans mesure dans lequel, il les habille, il porte l’impudence à un degré qui vous abasourdit et laisse ses admirateurs Farba Ngom, Mame Mbaye Niang et les autres esbaudis.

Stefan Sweig parlant de Joseph Fouché (ministre de la Police pendant les journées révolutionnaires en France à l’époque du Directoire) : « Il marche, non avec une idée, mais avec son temps et, plus est rapide la course de celui-ci, plus sera grande la vitesse qu’il prendra pour le suivre. Ce que ses anciens amis penseront et diront de lui, l’opinion de la foule et du public, le laissent complètement indifférent. Opportuniste, il connaît l’irrésistible force de reniement qu’a la lâcheté ; il sait qu’en politique pour agir sur les masses, la hardiesse est le dénominateur décisif de tous les calculs. »

Ce portrait de Joseph Fouché par Stefan Sweig, sur lequel on peut aisément apposer la figure de Macky, s’il peut nous renseigner sur sa psychologie, ne nous dit rien en revanche sur son projet politique depuis 2012.

Finalement, nous avons élu Président un homme dont on ne savait pas grand-chose de ses intentions politiques, ni comment il s’inscrivait dans le récit national de notre pays (si d’ailleurs c’est un sujet qui l’intéresse). 

J’ai défini ce régime, comme essentiellement une aventure politique d’un groupe qui s’est lancé dans le pari de gagner les élections présidentielles de 2012 et qui a réussi.

Peut-on en déduire que par nature, dans cette situation, son seul projet est de garder le pouvoir ?

Quoi qu’il en coûte.

C’est assurément ma conviction.

Les manifestations des militants, se roulant par terre au palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor, le clan des griots convoqués pour chanter les louanges du chef éternel, les lutteurs bandant les muscles et se disputant les millions de francs que le chef leur distribue, rien n’y a fait.

Ces pauvres élus et cadres de Benno, s’égosillant à tour de rôle sur leur pauvre sort, si jamais le chef bien aimé ne se présentait pas, ont dû se rendre à l’évidence. Cet homme envers qui ils éprouvent un amour ardent et authentique, pour qui ils sont prêts à tous les sacrifices, a une mentalité de proconsul.

Il doit être seul à décider et personne ne doit lui imposer sa décision. 

La mobilisation des citoyens, partout sur le territoire et, parmi eux ces admirables femmes du « bois sacré » en Casamance, armées de leurs chants, de leurs danses et souvent du drapeau national, proclamant leur citoyenneté, face à ceux qui s’interrogent sur leur loyauté aura contribué à faire caner le chef de ses velléités de troisième candidature à un mandat.

Mais cet homme antipathique n’a pas de passion, sauf celle de gagner pour lui-même et les siens.

Boris Diop a dit dans une fameuse interview qu’il était aussi inculte.

Ceux qui ont donc contribué à sa reculade et sa défaite doivent en payer le prix. Il faut turbuler le système, renverser la table, quitte à s’asseoir sur 60 ans d’histoire politique du pays.

Mais jusqu’où peut aller Macky Sall ?

Les images de la bagarre généralisée au siège de l’APR les chaises qui voltigent sur les têtes des militants et les candidats putatifs à la succession qui prennent leurs jambes à leur cou et laissent les pauvres gars à leur triste sort, voilà qui souligne à souhait ce qu’est ce parti et la tâche herculéenne du chef pour se choisir un successeur.

Elles illustrent aussi d’abord la pétaudière qu’est l’APR et Benno, une association de clientèle que ne réunit que l’appât du gain et les prébendes sur les deniers publics.

L’incapacité du chef à décider, le recours au dinosaure Moustapha Niass sorti de la naphtaline et le refus d’une primaire entre les candidats témoigne d’un régime qui finira comme son créateur par l’implosion « façon puzzle » comme dirait l’autre.

Il n’y a aucun signe montrant que la continuité de la gestion a été pensée, en dehors du prolongement du mandat du chef.

Parce que le bonapartisme est le régime qui cultive la volonté et la croyance qu’une poignée d’hommes menée par le génie visionnaire du chef Macky Sall en l’occurrence, peut changer le destin de cette nation et le cours de notre histoire et qu’il sera chanté par les grands griots à l’instar de Samba Gueladjo Diégui, ce prince magnifique de l’une des plus belles épopées peules.

A écouter ses thuriféraires, ce président-héros est appelé par un élément quasi-surnaturel (d’où peut être les séjours permanents à la Mecque et les retraites spirituelles mystiques régulières). Peut-être entend-t-il des voix lui susurrer qu’il a un destin exceptionnel.  

Mais à écouter que ces voix, ne voit-il pas que son destin politique est désormais derrière lui ?

Personne ne peut à ce jour prédire ce que sera la situation politique après les présidentielles de février 2024. Mais les éléments politiques dont on dispose aujourd’hui montre que si les procédures démocratiques sont respectées, le successeur désigné par Macky Sall sera laminé, qu’il ne sera même pas qualifié pour le second tour éventuel des présidentielles.

Mais l’environnement interne et à l’échelle de la sous-région en perpétuel mouvement ne nous rassure pas sur les intentions du chef.

Les pouvoirs galonnés qui nous entourent lui donneront-ils le prétexte ou l’envie de se maintenir au pouvoir ?

La logique de la tentation bonapartiste du « sauveur de la patrie » pourrait le conduire à vouloir se poser en recours pour continuer à « défendre la Nation » en invoquant une crise nationale d’envergure dont lui seul serait capable de nous sortir.

Pour les démocrates de ce pays et du monde entier qui aiment le Sénégal la lutte pour le maintien de l’idéal républicain, de l’Etat de droit, de la séparation des pouvoirs, de la souveraineté du peuple à choisir ses dirigeants, passe par le départ de Macky Sall peut être malgré lui et ses velléités, après les présidentielles de 2024.

Au Sénégal, le pire n’est jamais sûr…

Le pire n’est jamais sûr…
Mais, on y va tout droit.
Le régime de Macky est-il si sourd et aveugle qu’il ne voit pas le niveau de détestation dont il est l’objet dans ce pays, en zone urbaine et rurale et dans toutes les couches sociales ? Une simple plongée dans le quotidien des citoyens lui aurait, pourtant, donné des indices sur le niveau de ras-le-bol observé, comme jamais dans l’histoire politique récente, à l’exception de la toute dernière période du président Wade.

Mais, on y va tout droit.

Le régime de Macky est-il si sourd et aveugle qu’il ne voit pas le niveau de détestation dont il est l’objet dans ce pays, en zone urbaine et rurale et dans toutes les couches sociales ? Une simple plongée dans le quotidien des citoyens lui aurait, pourtant, donné des indices sur le niveau de ras-le-bol observé, comme jamais dans l’histoire politique récente, à l’exception de la toute dernière période du président Wade. 

Le pouvoir est pris dans son propre piège.

Dans la stratégie du régime, pour légitimer politiquement et non en droit, le troisième mandat du président Macky SALL, la diabolisation de Ousmane Sonko était la pierre angulaire. Il était supposé être le plus mauvais candidat, celui qui trainait une réputation sulfureuse, des accointances avec les indépendantistes de Casamance, les salafistes et autres courants issus de la mouvance sénégalaise des frères musulmans des Ibadou Rahmane et des autres.

En somme, toutes tares qui devaient le disqualifier aux yeux des républicains et des citoyens attachés au contrat sénégalais (notre commun vouloir de vie commune) fait de modérations, de compromis social et de juste milieu.

Cette stratégie a ripé sur le contexte socio-économique du pays. La crise est profonde, nonobstant ce qu’en dit le régime. Pour qui sait lire entre les lignes et le langage, très diplomatique, des institutions de Bretton Woods, notre économie va droit dans le mur. Un niveau d’endettement public record à 75% du PIB qui tend à être insoutenable. Une baisse drastique des recettes fiscales par comparaison à la hausse continue de la dépense publique, surtout de la masse salariale de l’Etat (due plus aux recrutements clientélistes que pour accroître l’efficacité des ressources humaines de l’Etat).

Un niveau d’inflation de 9,7% jamais vu depuis des décennies (dixit le FMI). Les ménages sénégalais confrontés quotidiennement à la hausse des prix, aux marchés, dans les transports en commun, le savent mieux que ces experts. Ce n’est pas le millefeuille administratif inventé par le gouvernement pour baisser les loyers et la frousse que lui donne les transporteurs privés, qui vont aider à diminuer les prix de ce côté.

Mais le pire est à venir, avec la quasi-injonction du FMI pour que le gouvernement supprime les subventions sur l’électricité. La hausse de la facture de la Senelec devrait suivre bientôt. 

Et ce gouvernement gage, tous les jours, les revenus à venir du pétrole et du gaz. Et la presse aux ordres salue avec tambours et trompettes et au son des balafons, la levée presque mensuelle de fonds auprès des banques et des investisseurs afin d’assurer la trésorerie pour le fonctionnement de l’Etat.

Et pendant ce temps, les entreprises nationales courent derrière leurs factures pour être payées sur les maigres parts de marchés qu’elles arrivent à gagner. Puisque les entreprises chinoises, turques, marocaines et françaises raflent, désormais, tous les appels d’offres publics.

Ce qui reste est littéralement donné « aux amis du pouvoir » pour en enrichir quelques-uns. Voilà le tableau qui s’offre aux citoyens sénégalais. Vie chère, appauvrissement des familles, gabegies financières, corruption indécente de quelques-uns jusqu’au plus haut sommet du régime.

L’indécence de l’enrichissement accélérée du griot du président, du beau-frère, du figurant actuel au ministère du tourisme, heurte au plus profond, les masses de sénégalais qui n’en peuvent plus.

Et on voudrait leur vendre cette alternative ridicule du Moi (Macky) ou le Chaos (Sonko).  Les Sénégalais ont répondu, lors des dernières élections locales en donnant, une majorité de grandes villes et des communes des grandes zones urbaines à l’opposition (coalition Yewwi askan wi et Walu).  Et lors des législatives, en infligeant une retentissante raclée électorale à la majorité sortante de Macky Sall.

La politique du ventre selon Macky

En décembre 2012, dans un article prémonitoire paru le 04 décembre 2012 dans Sud Quotidien (à retrouver sur mon blog bfbac.com), « Un pas en avant, deux pas en arrière », je donnais mon sentiment, sur les premiers pas du régime de Macky SALL.

« Au poker, quand un joueur a la meilleure main qui soit et perd sa mise, on parle de BAD BEAT. Ce joueur est un « FISH », c’est à dire un joueur débutant, inexpérimenté qui commet des erreurs grossières et visibles. Après plus de 6 mois de fonctionnement, le gouvernement du Sénégal donne cette impression désagréable d’amateurisme, d’impréparation à la gestion de l’Etat, de pusillanimité, de pilotage à courte vue et quelque fois plus grave de reproduire ce que Wade a appris à beaucoup d’entre eux du temps de leur fameux compagnonnage.  En somme du Wade sans Wade. Et pourtant nous avons tellement attendu ce changement ! 12 ans d’un pouvoir qui a réduit à néant notre culture des règles de la bonne administration publique, de l’Etat de droit, réduite à néant au profit de coteries familiales et financières. »

Le temps m’aura donné raison au vu de la réalité de ce qu’il est devenu aujourd’hui.

Ce régime a ruiné l’Etat, fragilisé les institutions publiques, privilégiant les allégeances politiques à la compétence professionnelle et technique, dans le choix des directeurs d’administration et de sociétés nationales, explosé jusqu’à l’écœurement le nombre de ministres, de sous ministres et de conseillers estampillés ministres-conseillers. Il n’est que de voir, à la lecture du communiqué du conseils des ministres, sur la chaîne de télévision officielle, cette galerie de mines réjouies, installée devant la longue table du conseil des ministres et faussement studieuses. « Adieu veau, vache, cochon, couvée » se surprennent à reprendre cette expression de La Fontaine, certains anciens en songeant à ce qu’était un conseil des ministres du temps de L. Senghor et A Diouf. 

La litanie des scandales financiers n’en finit plus.

Sud Quotidien, dans un article récent en a fait une chronique de 2012 à ce jour : COUD, NDINGLER PETROTIM, BICTOGO, PRODAC TER, TF 1451/R…et last but not least, le Fonds Force Covid19, riche de mille milliards de FCFA sur lequel, beaucoup de ceux, que la politique des copains et des coquins a réuni, se sont bâfrés goulûment.

Puisqu’il n’y a plus de limites à l’indécence, les rapports d’audits des corps de contrôle on s’assoit dessus, la peur du gendarme a disparu, pourquoi se retenir désormais. Tous les jours, c’est à celui ou celle qui affichera le plus ostensiblement sa loyauté au chef, avec les mobilisations des populations, achetées à coup de millions de FCFA, parmi les directeurs de sociétés nationales.  

Le régime de Macky Sall a aussi, créé cette galerie de monstres, miroir exact de celle de la période de Wade, incultes, sans foi ni lois, voraces, qui ne connaît aucune limite.

Après Pape Samba Mboup, Farba Senghor, Clédor Sène et sa bande de sicaires, soutenus et financés par Samuel Sarr, nous avons aujourd’hui Farba Ngom, Mame Mbaye Niang, Mamadou Lamine Massaly et de multiples Dr de tout et de rien.

Quelle est la nature de ce régime ?

Assurément d’une aventure politique, d’une prise de risque qui a réussi.

D’un homme, victime des outrances, des brimades de son mentor, qui décide avec un petit groupe d’amis et de sa famille, de se venger. Qui découvre, chemin faisant, les circonstances aidant, notamment la fin du régime de Wade et l’exaspération des citoyens, une fenêtre d’opportunités. Et qui s’en saisit, en sollicitant des appuis et des soutiens.

Si on analyse ce moment politique, qui révèle le candidat Macky Sall, inexpérimenté, sans moyens à l’époque, ne disposant pas encore d’un appareil politique, on voit bien que c’est sa capacité politique et son audace à se saisir des circonstances (quasi-insurrection des citoyens devant la volonté de 3ème mandat de Wade et de son souhait d’installer son fils comme héritier) qui le propulse au-devant des acteurs politiques traditionnels. Sa jeunesse et les moyens qui affluent achèvent de l’installer sur le podium.

Son instinct, l’empathie que lui démontre les citoyens, face aux vexations dont il est l’objet de la part de Wade, sa résilience, l’installe en tête des candidats au 1er tour des présidentielles de 2012. Ce ne sont certainement pas son programme insipide (Yoonu Yokkuté), ses dons d’orateurs ou son « charisme ».

Au 1er tour Macky SALL a recueilli 26,58% des suffrages. C’est la dynamique politique après cette première estocade inattendue contre Wade, qui fait le reste, grâce à la discipline de vote des électeurs du parti socialiste (11,30%). Et le rassemblement de Benno Bokk Yaakar derrière sa candidature unique, crée ce formidable et surprenant maelström du 2ème tour, qui voit la victoire écrasante d’un quasi-inconnu de la scène politique nationale à 65,80% des voix exprimées.

Mais, comme tous les analystes politiques le savent, au 1er tour on choisit et au 2nd on se rassemble. C’est pourquoi Macky Sall et ses conseillers les plus avisés, le voient bien, le socle électoral du régime est très faible. Et il n’est pas arrivé jusqu’à présent à faire la bascule, même aux présidentielles de 2019 où il est élu au 1er tour avec 58% des voix.

Il n’est donc pas étonnant qu’il s’agrippe jusqu’à la dernière énergie au rassemblement avec Benno Bokk Yaakar qui lui assure une majorité électorale de fait. Mais cette quasi-rente, que le parti socialiste et les vieux caciques de l’ex-gauche communiste (PIT et PIT), assurés de continuer à bénéficier de certaines sinécures, arrive à sa fin comme un cycle politique dans le cadre d’une séquence ouverte depuis 2012.

La perte de la majorité aux législatives de 2022, clôt cette séquence qui devrait aboutir à la fin de Benno Bokk Yaakar et ouvrir un autre cycle nonobstant la querelle entretenue sur le 3ème mandat.

Au fond, quand on analyse ce régime et ses animateurs et au premier chef le Président, on se trouve face à une suite d’actes politiques, qui fait la part belle à une sorte d’éloge de l’empirisme (débrouillardises plus trivialement), qui explique l’aveuglement quand surviennent les passages difficiles. Ce régime n’a pas de récit national à offrir aux sénégalais, si ce n’est de mauvais emprunts, qu’on habille sous le nom de l’efficacité.

A preuve, chaque réalisation et chaque investissement s’inscrit dans un « hub ». Ce techno langage (en franglais pour mieux en accentuer les effets) souvent utilisé pour dissimuler les faiblesses et les lacunes des projets.

Derrière, il y a cette idée que l’utilisation des termes techniques, des acronymes et des jargons, peut créer l’illusion de la complexité et de l’expertise et empêcher une remise en question et des critiques. Sans oublier bien sûr les montants en dizaines ou centaines de milliards de CFA, que son Excellence fait ruisseler dans ce pays chaque jour que Dieu fait.

Et le mimétisme dans le discours entre autorités politiques, du Président aux ministres et sous ministres est symptomatique de l’indigence intellectuelle et doctrinale qui règne au sein de ce régime, sur la démocratie, la République, la séparation des pouvoirs, la laïcité de l’Etat, la vision de l’économie politique au Sénégal

Le projet de 3ème mandat de Macky SALL est une menace pour la République et la démocratie.

Il faudrait être sourd et aveugle, pour ne pas voir que dès les résultats des présidentielles proclamés, un dispositif a été pensé, pour mettre sur les rampes une 3ème candidature présidentielle de Macky.

Les images, presque quotidiennes de l’activisme du cercle familial proche du Président, et du clan des « katangais » qui l’entoure, court-circuitant les instances de la coalition et de l’APR aphone, la montée au front régulier du ministre de la justice défendant cette hérésie juridique du droit au 3ème mandat, tout cela ne laisse aucun doute sur la volonté d’une candidature.

C’est dire combien l’aventurisme politique constitue un danger pour la démocratie.

Ce qui est vrai du « macronisme » en France, du « trumpisme » aux USA, l’est pour le régime de Macky Sall.

De tout temps, l’aventurisme en politique s’est toujours caractérisé par l’émergence d’un leader, en opposition radicale au système en place pour se positionner en alternative. Quand on écoute les discours de Macky Sall en 2011, contre A. Wade, les appels à l’insurrection, à l’intervention de l’armée ou à aller au Palais déloger le vieux Président, on se pince, eu égard aux cris d’orfraie que la presse pro-Macky pousse devant les discours actuels de Yewwi et de O Sonko.

Pour gagner en 2012, Macky Sall avait su opposer des solutions simplistes à la complexité des réponses de Wade, pour susciter l’adhésion du plus grand nombre de sénégalais.

Il a su attiser la colère des jeunes, surtout devant la gabegie de la gestion Wade, son clientélisme, sa gestion clanique et surtout la corruption généralisée du régime. Il s’est présenté comme le seul susceptible de changer le système, de représenter les exclus et les marginalisés.

Aujourd’hui ces ressorts sont cassés, à l’épreuve de sa propre gestion depuis 12 ans.

Et tout se passe, comme si, la lecture des dynamiques politiques actuelles avec Ousmane Sonko comme figure emblématique lui renvoyait à la fois l’échec de sa gestion et les conditions réunies de sa défaite en 2024.

Ce qui explique ses dérives autoritaires, la judiciarisation du champ politique, les rafles policières des opposants, l’instrumentalisation de l’administration territoriale et de la Justice.

L’aventurisme politique qui caractérise ce régime a des conséquences très graves pour la stabilité de nos institutions, l’avenir de la démocratie et de la République.

Dans un discours enflammé en février 2023 à Pikine, sans doute grisé par la foule et la chaleur, le falot premier ministre qu’il « a donné » au pays après la bérézina des législatives, a dit que Macky Sall sera candidat en 2024 et peut être en 2029.

« Nous n’avons pas de plan B ni de plan C. Macky Sall est notre seul plan. Que ça soit 2024 ou 2029, c’est du pareil au même. C’est à conjuguer au passé. Il peut compter sur nous. Nous nous attellerons à faire tout ce qu’il souhaite. Et c’est ce message qu’attend de nous le Président Macky Sall »

L’argument est toujours le même, pour les thuriféraires du pouvoir, le Président doit finir ses chantiers.

Et comme des chantiers s’ouvriront aussi, durant un autre mandat de 5 ans en 2024, il n’y a plus de limite juridique, ni morale, à une présidence à vie.

Puisqu’il peut se présenter autant qu’il le souhaite aux suffrages des citoyens. D’ailleurs on se demande bien pourquoi ennuyer les sénégalais avec ces appels aux suffrages ?

Peut-être pourrait-on décréter Macky Sall, Président Eternel, Grand dirigeant, Soleil de la Nation ?

L’aventurisme politique s’affranchit des règles et des valeurs de la démocratie, comme le respect des libertés publiques, de manifestations, d’expression des minorités. Les seules règles admises sont celles qui lui permettent le maintien au pouvoir. Les institutions n’ont de légitimité que celle que leur confère la loyauté à la parole et aux désirs du Grand timonier.

Le régime actuel engendre un clivage puissant au sein de la société entre les citoyens et tente de recréer les violences et les crises irrédentistes en Casamance, puisqu’à chaque fois doit se jouer cette posture du Moi ou le Chaos.

L’aventurisme politique de Macky Sall entamé en 2012, menace profondément la stabilité politique de notre pays.

En 2024, les républicains et tous ceux attachés à une certaine idée de cette Nation, à ses valeurs de tolérance, de respect de l’autre, de refus de l’homme providentiel. Ceux qui pensent que la démocratie est le pire des régimes à l’exception de tous les autres (Churchill) doivent lui infliger une défaite mémorable qui découragera tous les apprentis sorciers et autres illuminés, qui veulent se servir de la démocratie, sans être convaincus de ses vertus.

Sénégal: d’une crise à l’autre

J’ai regardé la vidéo du député de Benno Bok Yakkar, éructant, la bave aux lèvres, index tendu vers d’autres députés, surexcité et hors de contrôle, et    appelant à prendre des cordes et des chaînes pour attacher les mains des opposants et les jeter à la mer pour nourrir les poissons. Et le tout sous le regard impavide du président de l’assemblée, dodelinant de la tête et au pire soutenant ses propos.

Je ne connais pas ce député de la majorité présidentielle qui appelle au meurtre des opposants je ne souhaite surtout pas le connaître. Ce député a ses références, les cordes et les chaînes renvoient à cette période où des négriers et des chasseurs d’esclaves écumaient les côtes d’Afrique pour alimenter ce sinistre commerce. Dans ses propos j’ai cru comprendre que si le président Macky l’ordonnait, il mettrait ses projets à exécution. Que Dieu nous garde de ces illuminés.

Un autre, triste individu, a menacé de marcher sur les cadavres des opposants au 3ème mandat de Macky.

Jeudi 1er décembre on a assisté, sidéré, à ce spectacle odieux d’un député de l’opposition, membre du PUR, giflant une de ses collègues, parce que c’est une femme et qu’elle avait, de surcroît, fait des allusions à son mentor et guide religieux lors d’une séance précédente. La politique et la religion ne font jamais bon ménage. Ce député doit être condamné pour cet acte qui nous ramène à toutes les violences que subissent quotidiennement, les femmes sénégalaises.

Désormais, ces jours-ci, les citoyens sénégalais se réveillent chaque matin, attendant les nouvelles, plus lamentables les unes que les autres, en provenance de l’Assemblée nationale, avec un sentiment immense de honte nationale. 

Qu’avons-nous fait pour mériter ça ?

J’ai toujours considéré, comme réactionnaire et relevant d’une analyse déterministe de la société, cette assertion qui dit que toute nation a le gouvernement qu’elle mérite. 

J’ai toujours préféré Alexis de Tocqueville, qui considérait que la Providence n’a créé le genre humain ni entièrement indépendant, ni tout à fait esclave.

Et autour de chaque homme disait-il, il y a certes une fatalité ou, dirions-nous aujourd’hui, des déterminismes sociaux ou de classe, mais ils sont vastes et l’homme est puissant et libre.

Ainsi, les tyrans ne sont grands que parce que les peuples sont à genoux.

Cette institution, l’Assemblée nationale, nous citoyens sénégalais, l’avons gagnée et instituée comme la représentation politique éminente de la nation. Nous avons élu ceux qui y siègent avec nos suffrages.

Mais nous ne sommes pas responsables de leurs turpitudes, de leurs bassesses.

Pas en notre nom mesdames messieurs

Nos suffrages méritent mieux.

Je pense à tous ceux qui ont bâti la réputation de cette Assemblée, dont la culture politique, l’élégance des propos et la posture républicaine rayonnaient dans ces lieux.

Lamine Guèye, Amadou Cissé Dia, Habib Thiam, Daouda Sow, Cheikh Khadre Sissoko, pour ne citer que ces éminents parlementaires, ont présidé cette assemblée et ont laissé l’héritage d’un parlementarisme sénégalais inscrit, désormais, comme un des piliers de notre République.

Cette législature a débuté sous de sombres augures, avec des législatives manipulées par le régime de Macky Sall. Ce qui n’a pas empêché qu’il boive la tasse jusqu’à la lie, une totale bérézina électorale.

Et pour la première fois dans notre démocratie, un gouvernement est sans majorité parlementaire avérée. Avec des députés élus, dont la seule consigne, reçue du président lui-même, est une posture de lutteur avec comme chef de meute le griot himself du chef. On a du mal à le comprendre, pour ceux qui croient à un Sénégal moderne affranchi de cette mentalité féodale.

Dans le spectacle offert à longueur de retransmission, mais qui devrait être interdit aux enfants, on entend fuser des insultes si grossières, qu’on doit se pincer pour croire que l’on se trouve vraiment au Parlement sénégalais, siège du pouvoir législatif, à lui confié, par nous citoyens. 

On n’est pas surpris de voir Macky Sall dérouler son programme énoncé auprès de ses militants à Kaffrine en 2015 : « je veux réduire l’opposition à sa plus simple expression. » 

Et dans une asymétrie presque parfaite, une partie des députés de l’opposition veut en découdre, marquer son territoire, pour lui montrer qu’il est minoritaire dans ce pays, même s’il faut, pour cela, transformer l’Assemblée nationale en arène.

On vitupère. On interpelle. On se marque. Il n’y a plus de nuances, le combat est frontal.

C’est le retour du refoulé, pour beaucoup, avec pour seul bagage l’injure, l’apostrophe grossière, l’invective, témoignant de l’oubli de toutes nos traditions et valeurs de tolérance, de respect de l’autre, de tempérance dans les actes, qui fondent la société sénégalaise du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest de ce pays.

On peine à saisir dans les interventions des uns et des autres, un travail de fond dans le débat d’orientation budgétaire et le vote du budget des différents ministères.

On ne débat plus, on ne cherche plus le compromis, qui est l’essence même du parlementarisme, négocier entre groupes parlementaires, dans l’intérêt de la nation.

« Le parlementarisme, c’est la garantie des citoyens, la liberté de la discussion, la liberté de la presse, la liberté individuelle, le contrôle de l’impôt, le droit de savoir ce qu’on fait de notre argent, le contrepoids de l’arbitraire (…) tout cela n’est plus… » disait Victor Hugo dans son pamphlet Napoléon le petit.

A voir notre Parlement actuel, on pourrait penser que ces phrases d’Hugo ont été écrites cette semaine après le spectacle misérable qui nous est offert tous les jours. 

J’ai le sentiment qu’on court tout droit vers une crise de régime.

Sieyès définissait ainsi le principe de la légitimité politique : « Le peuple ne peut parler et ne peut agir que par ses représentants. »

Dès lors que le président lui-même, par ses actes et ses consignes aux députés de la majorité ne leur confère aucun rôle dans la conduite des affaires de la Nation, mais plutôt les assigne à un rôle de chiens de garde, le moment va arriver où les citoyens de ce pays, au nom desquels on prend les décisions, entrent en rébellion ouverte contre les porte-parole institués.

C’est ce qu’on appelle une crise de la représentation engendrant une crise profonde de la délégation de pouvoirs, donc une crise de régime.

L’inculture politique de ceux qui gouvernent aujourd’hui, les aveugle sur leur capacité à faire le dos rond et rester aveugle devant la crise qui arrive à grands pas, multipliée par les conditions de vie de plus en plus difficiles pour la très grande majorité des citoyens sénégalais.

L’histoire politique de notre pays a connu de multiples crises.

Des crises issues de contextes électoraux comme en 1963, en 1988 et en 1993, et des manifestations et des violences qui ont parsemé la journée du 21 juin 2011 contre les tentatives de Wade de modifier le mode de scrutin et celles de janvier contre le même Wade sur le 3ème mandat.

Et si la crise et les manifestations de mars 2021 ont pris une telle ampleur c’est qu’elles se conjuguaient avec une véritable défiance vis-à-vis du pouvoir de Macky Sall, la gabegie, la corruption de son clan et la dilapidation des maigres ressources économiques par son régime avec ses marchés publics octroyés presque exclusivement aux firmes étrangères.

Alors, attention à ne pas se retrouver, à force de jouer les apprentis sorciers et à esquiver les réponses aux aspirations démocratiques et sociales de la très grande majorité de notre peuple, face à une situation qu’on n’ose imaginer.

En 1852, au début du dix-huit Brumaire de Louis Bonaparte, Karl Marx écrivait : « Hegel fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages de l’histoire se produisent pour ainsi dire deux fois, mais il a oublié d’ajouter : la première fois comme une grande tragédie, la seconde fois comme une farce sordide. »

Il appartient aux républicains de dire maintenant Stop.

Il est temps, maintenant, d’arrêter cette machine infernale qui inéluctablement risque de plonger notre pays dans les abysses.

Sénégal: laïcité/sécularisme

Le post sur Facebook de Mary Teuw Niane du 14 septembre 2022 : « la laïcité, un tabou étranger à notre culture » me donne l’occasion de revenir sur un sujet qui est un nœud gordien pour l’évolution de la République. Qu’est-ce qu’un citoyen ? Quel sens donner au pacte social, ou pour reprendre la magnifique expression senghorienne, « notre commun vouloir de vie commune. »

Mais avant, il est nécessaire de clarifier le débat et cerner ses enjeux.  

1. La laïcité à la française 

La première définition formelle de la laïcité fut exprimée, en 1881, par Ferdinand Buisson, philosophe, homme politique et cofondateur de la ligue des droits de l’homme en 1898. Il considère la laïcité comme le résultat d’un processus historique au cours duquel la sphère publique s’est affranchie du pouvoir de la religion. Il en résulte l’État laïque, neutre à l’égard de tous les cultes, indépendant de tous les clergés, pour réaliser l’égalité de tous les citoyens devant la loi, avec des droits assurés en dehors de toute condition religieuse et la liberté de tous les cultes.

Cette spécificité française trouve sa traduction dans la loi dite de séparation de l’église et de l’Etat de 1905. Les historiens sont tous d’accord aujourd’hui pour démontrer qu’il y a plusieurs modèles qui se sont affrontés lors des débats parlementaires de l’époque. Cependant dans le cadre de cette analyse, je retiendrai le modèle majoritaire porté par Aristide Briand et Jean Jaurès. Jean Baubérot le définit ainsi : « La loi non seulement assure la liberté de conscience et le libre exercice des cultes (article 1) mais respecte l’organisation de chaque religion (article 4), même si aucune religion n’est désormais « reconnue » ni financée sur fonds publics (article 2).

La laïcité ainsi définie par la loi autour de la liberté de conscience, comporte une dimension qui déborde l’aspect strictement individuel. Avec l’instauration d’aumôneries sur fonds publics (fin de l’article 2), avec la dévolution gracieuse des édifices du culte, propriété publique, aux associations cultuelles et diocésaines (articles 7 à 17), avec la construction, dès les années 1920, de la Grande Mosquée de Paris, la loi de 1905 et son application ultérieure ont fait que, dans certains cas, l’exercice de la liberté de conscience comme « liberté de culte », garantie par l’article 1 de la loi de 1905, doit l’emporter sur l’absence de subvention. C’est la position constante du Conseil d’État en France, et d’associations comme la Ligue de l’enseignement ou la Ligue des droits de l’homme qui a aussi permis enfin, durant les années 2000 la construction de carrés musulmans dans beaucoup de cimetières et de centaines de mosquées dans plusieurs villes de France.

Pour les sociologues des religions, la laïcité française ne constitue pas une exception, mais s’inscrit dans la même dynamique historique que les différents sécularismes qui ont traversé l’histoire mondiale.

Enfin, Mary Teuw ne comprend pas le concordat en Alsace-Moselle : « en France même, le principe de la laïcité n’est pas universel. » En fait ce dont il s’agit, c’est du statut spécifique des trois départements d’Alsace-Moselle, qui n’étaient pas français de la fin de la guerre de 1870-1871 à 1919 (après la Première Guerre mondiale). Les lois de laïcisation de l’école publique et la loi de 1905 ne leur ont donc pas été appliquées quand elles ont été votées.  Ces trois départements ont globalement, conservé le régime issu de la loi Falloux de 1850 (pour l’école publique) et le régime du Concordat et des Articles organiques (1802) qui induit un financement des « cultes reconnus » et le paiement de leur clergé sur fonds publics. Quand ces départements sont redevenus français leur régime spécifique a été maintenu « à titre provisoire ». Non seulement ce « provisoire » dure encore, mais le Conseil constitutionnel a rendu une décision selon laquelle un tel statut juridique est conforme à la laïcité de la République énoncée par la Constitution.

2. Définition et historique du concept de sécularisme

Le terme sécularisme est un anglicisme. Il s’agit d’une doctrine selon laquelle la religion ne doit pas avoir, ni chercher à avoir de pouvoir politique ou législatif.

Elle prône la séparation de l’Eglise et de l’Etat et affirme en corollaire que le pouvoir politique ne doit pas intervenir dans les affaires propres aux institutions religieuses.

Le sécularisme désigne une tendance objective et universelle à faire passer les valeurs sociales du domaine du sacré à celui du profane.

On peut le penser comme l’exigence de la séparation des institutions séculières du gouvernement et de la religion, mais il ne s’y réduit pas.

Il renvoie à la désacralisation de l’organisation sociale perçue non pas comme une donnée naturelle exigeant l’adhésion automatique aux valeurs établies, mais plutôt comme un produit de l’histoire des politiques humaines.

a.    Sécularisme et sécularisation en Europe

Le processus historique de sécularisation est d’abord apparu sous la chrétienté médiévale ou dans les empires islamiques et sans aucun doute dans d’autres sociétés également.

L’art, le droit, ou la politique conquièrent au fil du temps leur autonomie à l’égard d’une pensée religieuse qui les avait d’abord fondés.

La séparation est acquise entre les différents segments de la vie sociale. La religion n’est plus que l’un d’entre eux et non celui qui donnait sens à tous. Elle se manifeste dans l’émergence d’aspirations, d’attitudes et de comportements nouveaux.

Dans beaucoup de pays de culture catholique la logique fut celle de la laïcisation. La religion s’est trouvée reléguée dans la sphère privée.

En pays protestant, l’émancipation de la religion s’est opérée selon une logique de sécularisation, moins conflictuelle. Dans ce cadre, les activités publiques exercées par des groupes religieux sont reconnues juridiquement, y compris leur contribution à l’éducation citoyenne (par des cours de religion dans les écoles publiques, par exemple).

La construction européenne favorise également la diffusion du principe de la dissociation croissante de la confession religieuse du domaine public et son intégration croissante dans la sphère privée.

Et la Convention Européenne des Droits de l’Homme de novembre 1950 (article 9) a consacré les principes de tolérance et de liberté religieuse.

b.    Sécularisme dans le reste du monde

Dans certaines sociétés de culture musulmane contemporaine, la séparation entre le processus de sécularisation et celui de laïcisation est mieux affirmée, et cela pour deux raisons.

La première est que le combat pour la modernité fut essentiellement un combat contre la domination coloniale et non contre un ennemi intérieur (le clergé catholique en France par exemple).

L’aspiration à l’émancipation du joug colonial imposait la nécessité de maintenir des contradictions provoquées par le processus de modernisation sociale. La religion en sortit à la fois renforcée et rénovée par l’addition d’une dimension identitaire.

La seconde est que l’appel aux réformes et à la modernisation est venu, souvent, des élites religieuses, qui sont les alliées privilégiées des acteurs politiques majeurs. Ces derniers comptent sur elles non seulement pour neutraliser les courants conservateurs religieux (sous le masque du réformisme souvent et contre les confréries), mais également pour ses politiques. Les relations entre Léopold Sédar Senghor, ses compagnons et les différentes personnalités religieuses dans les périodes pré et post indépendance s’inscrivent dans ce contexte.

On peut parler d’un « islam républicain » en écoutant cette vidéo témoignage avec cet interview à la télévision française de Serigne Fallou Mbacké sur ses rapports avec le président Senghor.

La description que donne Serigne Fallou Mbacké de ces relations, correspond exactement à ce que l’on désigne sous le concept de sécularisme. La religion ne doit pas s’occuper de politique et la politique ne doit pas s’occuper de religion.

Dans le cas de la fin de l’empire ottoman et de la proclamation de la République turque, Jean François Bayart, politologue (in Islam républicain. Fayard) montre que l’islam est le « fil caché » qui relie les deux systèmes. Contrairement à l’idée reçue selon laquelle Mustafa Kemal Atatürk a cherché à dépecer les institutions de leur manteau islamique, les « Jeunes Ottomans » se sont en fait inscrits dans une longue durée où l’islam a servi de fondement – certes pas le seul – pour bâtir la République turque. Les musulmans ont fini par endosser la République et les sécularistes se sont faits à son visage islamique

On le voit donc, l’histoire mondiale est traversée par ces deux processus, le sécularisme et la laïcité qui indiquent deux conceptions du rapport entre le religieux et le politique.

En Occident, le processus de séparation entre les deux sphères s’inscrit sur la longue durée, sur les autres continents le phénomène est moins visible et prend d’autres formes qui épousent l’histoire sociale de chaque pays.

En Inde par exemple où le sécularisme s’est le mieux épanoui, toutes les religions sont présentes dans la sphère publique. Le résultat est le même qu’en Occident dans la mesure où les croyances se valaient toutes du point de vue de l’Etat indien, encore récemment jusqu’à l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite hindoue avec le BJP de Narendra Modi. 

Le sécularisme indien s’inscrivait dans une longue tradition de multiculturalisme et de tolérance religieuse qui commence avec l’empereur bouddhiste Ashoka, qui a régné au IIIe siècle avant notre ère.

Mais ce passé seul, ne suffit pas pour maintenir cette tradition de tolérance, car sans les hommes comme Gandhi et Nehru pour le traduire en termes politiques et institutionnels, il n’y aurait pas de sécularisme à l’indienne aujourd’hui. Gandhi se battait pour la reconnaissance du religieux sur un mode collectif dans l’Inde nouvelle alors que, pour Nehru l’appartenance religieuse devait finir par passer au second plan, sinon s’effacer derrière des identités individuelles.

A l’exemple de l’Inde, le sécularisme a été un formidable facteur de cohésion sociale dans beaucoup d’Etats, de pays de culture musulmane dans le monde. Il a permis de transcender les clivages confessionnels. On était citoyen d’abord, locuteur de telle ou telle langue, et puis éventuellement animiste, hindou, musulman, bouddhiste ou chrétien. Le sécularisme a permis sinon de gommer totalement, au moins d’amoindrir les différences liées à l’appartenance religieuse des citoyens.

3. La laïcité comme concept constitutionnel au Sénégal

Mary Teuw Niane expose un peu plus clairement, pour une fois, une opinion jusque-là dominante, y compris au début de notre Etat-nation, chez les « réformateurs musulmans » (critiques des rapports confréries et autorités publiques, souvent issus des mouvances wahabites) dans les années pré et post indépendance.

Cette conception repose sur le refus de la séparation de la religion et de l’Etat ou plutôt de sa neutralité face aux confréries et au clergé catholique et prône la contribution des religions à l’éducation des enfants (enseignement public des religions et financements des écoles coraniques). C’est ce que propose Mary Teuw Niang dans cette critique de la laïcité au Sénégal : « L’inscription du principe de la laïcité dans la Constitution de notre pays est … surtout le moyen invisible de couper le cordon ombilical des religions avec notre société. Ceci malgré le fait que la religion joue un rôle fondamental dans la formation de notre jeunesse et la construction de sa personnalité. »

Au-delà de l’éducation, on comprend que ce qui est en jeu c’est la question des sources (religieuses ou profanes) de notre Droit et de la Constitution, comme Loi Suprême.

Dans sa comparaison avec les pays européens il cite : « sur les vingt-sept (27) pays de l’Union Européenne (UE), la France est le seul pays qui a inscrit le principe de la laïcité dans sa constitution. Le principe de la séparation des Églises et de l’État n’est inscrit que dans la constitution de huit (8) pays au niveau de l’Union Européenne : Hongrie, Lettonie, Portugal, Tchéquie, Slovaquie, Slovénie, Suède et France. »

Mary Teuw montre une incompréhension de l’historicité des rapports entre autorités ecclésiastiques et Etats dans les exemples européens cités. La tradition gallicane de certains Etats européens a toujours reposé sur l’ambition de garder la haute main sur les églises, avec une volonté farouche de les maintenir à l’écart du pouvoir du Pape. Cette tradition qui a commencé en France et a abouti à la séparation par la loi de 1905, a concerné toute l’Europe. En Grande Bretagne, ce processus, après la rupture de l’église catholique d’Angleterre avec Rome consacre l’église anglicane sous l’autorité de la royauté.  

Une autre tradition européenne est incarnée par les Etats du Nord de l’Europe, scandinaves et anglosaxons protestants pour qui les principes de laïcité et de séparation de l’Eglise et de l’Etat sont constitutifs du fonctionnement de l’Etat. Car le protestantisme est avant tout un système de conduite autonome de la personne. Dieu et le monde sont dans des galaxies séparées et entre les deux, le fidèle organise lui-même une relation de compromis. C’est ne rien comprendre à l’éthique protestante pour reprendre l’expression de Max Weber, que d’assimiler ces situations léguées par l’histoire de chacune de ces nations.

Les bâtisseurs de la République, de Senghor à Mamadou Dia tous profondément croyants, au moment de poser les fondements d’un Etat moderne, n’ont pas regardé du côté des Etats dont l’inspiration constitutionnelle était les textes sacrés comme certaines républiques ou monarchies islamiques en Afrique et au Moyen Orient, mais plutôt des Etats séculiers modernes en Europe, en Asie et en Amérique.

L’histoire leur a donné raison au regard de l’évolution de ces Etats durant les périodes pré et post indépendance par rapport à ceux qui n’ont pas opté très clairement pour une séparation entre la religion et la gestion des affaires publiques. Les guerres civiles, les conflits de nationalité, les poussées des hordes de fanatiques djihadistes actuelles témoignent du danger de l’ambigüité ou de l’absence de choix clairs sur le modèle de l’Etat.

J’ai toujours pensé que la laïcité de l’Etat au Sénégal, constituait un impensé chez les pères fondateurs de notre République.

Ce parti pris, que je soupçonne, délibéré de leur part, résulte pour moi, de l’appréhension de l’ampleur du combat pour la dissolution du système colonial raciste et de l’indigénat. Et par ailleurs, du temps qu’il leur fallait pour construire et mettre en œuvre les concepts de citoyenneté sénégalaise et africaine

Il n’est que de lire les débats qui, à partir de 1948, traversent les rangs des bâtisseurs de l’Etat-nation à travers les journaux « Condition Humaine » et « l’Unité » ensuite organe du BDS et du BPS sur la fin de l’empire colonial français et l’AOF pour le mesurer. 

Comment rompre avec cet oxymore du projet colonial de la constitution française de 1958 d’assimilation/égalité ?

Avec le recul historique on peut se représenter ces hommes et femmes d’Etat, face à cette question existentielle de fonder un Etat moderne, sur un territoire dont l’Etat français depuis deux siècles s’est évertué à éradiquer toutes les représentations institutionnelles précoloniales.

Mais les formations sociales sur le territoire du nouvel Etat gardent néanmoins la mémoire et les traditions de système d’inégalité et de domination et de système d’ordre, pour reprendre les concepts de A. Bara Diop dans son anthropologie de la société wolof.  

Comment assurer l’unité politique des diverses formations sociales et populations vivant sur ce territoire par un Etat dont les structures intrinsèques résultent d’un héritage de domination de deux siècles et par exemple quel rôle pour les autorités coutumières, chefs de canton, chefs de village, cadis ?

Le projet politique que portent ces bâtisseurs et fondateurs (de Blaise Diagne à Galandou Diouf, en passant par Lamine Guèye, Mamadou Dia, et tous leurs compagnons militants, syndicalistes), depuis toujours est de construire un Etat républicain pour fonder une nation de citoyens sénégalais.

Mary Teuw Niane dans son post polémique dit : « Dans nos tropiques africains francophones, la laïcité est la plus grande arnaque politique, sociale et culturelle que les pères fondateurs de notre constitution nous ont léguée. »

C’est faire injure à ces pères fondateurs qui auront arpenté, visité chaque ville, village, canton du Sénégal, discuté avec les autorités coutumières, confrériques de ne pas avoir réfléchi sur ce qui devait définir les citoyens de ce pays. Et surtout de ne pas avoir une idée précise sur la nature de la nation qu’ils avaient l’ambition de construire, malgré des appartenances religieuses, confrériques, linguistiques différentes, des modes de vie, d’habiter, des systèmes fonciers et de modes de production extrêmement variés. 

Je relisais récemment la belle biographie d’Ibrahima Seydou Ndaw, parue chez l’harmatan en 2013, et l’autobiographie de Assane Seck « Sénégal, émergence d’une démocratie moderne » pour soupeser le degré de tension intellectuelle, les débats et le combat politique dans lesquels ils étaient tous plongés à cette époque. 

Le concept de laïcité pour définir la nature de la république tranche, pour moi, le clivage interne au sein des fondateurs à propos de la notion de liberté comme principe fondateur de ce qu’est un citoyen sénégalais. La mention « démocratique et sociale » résulte d’un compromis entre les différents courants.

Senghor et ses compagnons distinguaient parfaitement ce que les historiens actuels nomment les sécularismes, pour distinguer entre la laïcité à la française et les autres formes, mais qui reposent tous sur la liberté de conscience, la citoyenneté sans fondement religieux et la séparation de l’État et de la religion.

4. Application du principe laïque au Sénégal ou le sécularisme sénégalais

La constitution de 2001 révisée en 2016, mentionne dans son préambule: la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, les accords et règlements des nations unies et de l’union africaine (Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes du 18 décembre 1979, la Convention relative aux Droits de l’Enfant du 20 novembre 1989 et la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 juin 1981. ) 

L’article 1, alinéa premier de la constitution de la République proclame : « la République du Sénégal est laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. Elle respecte toutes les croyances.

Dans un article, paru dans Ethiopiques n°22-1980, le recteur Seydou Madani Sy dit de la constitution de 1963 révisée (dernière révision lors de la rédaction de cette analyse le 24 avril 1981) : « l’idéologie laïque qui sous-tend la Constitution du Sénégal n’est pas une idéologie de combat, puisqu’il n’y a pas, comme en France à l’origine par exemple, une hostilité aux Eglises et à l’Islam. La laïcité mise en œuvre se rattache à l’idéologie laïque qui déclare l’incompétence de l’Etat à l’égard de ce qui excède le gouvernement du temporel, impliquant le refus de proposer, ou même de cautionner une explication de l’homme et du monde. Mais c’est un Etat qui, à l’égard de toutes les options, professe a priori la même attitude d’impartialité. »

On peut définir la laïcité sénégalaise comme une laïcité compréhensive.

Mieux, contrairement à ce que laisse entendre Mary Teuw Niane, dans la nouvelle constitution de 2001, révisée par référendum en mars 2016, plusieurs articles s’inscrivent dans cette logique de laïcité positive et compréhensive à rebours de la conception française.

  • L’article 4 qui traite des partis politiques, interdit l’identification à une race, à une ethnie, à un sexe, à une religion, à une secte, à une langue ou à une partie du territoire.
  • L’Article 5 interdit tout acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse.
  • L’article 8 proclame que la république du Sénégal garantit à tous les citoyens les libertés individuelles fondamentales… dont les libertés religieuses.
  • Les articles 20 et 22 qui consacrent le droit à l’éducation de tous les enfants et le devoir des parents, demandent que l’Etat veille à l’exercice de ce droit. Et plus encore, et à croire que Mary Teuw tout ministre qu’il fut, n’a pas lu la Constitution, l’Etat sénégalais reconnaît la contribution des institutions religieuses à l’éducation des enfants. Les institutions et les communautés religieuses ou non religieuses sont également reconnues comme moyens d’éducation.
  • Et enfin l’article 24 consacre la place de la religion dans l’espace public comme jamais : « la liberté de conscience, les libertés et les pratiques religieuses ou cultuelles, la profession d’éducateur religieux sont garanties à tous, sous réserve de l’ordre public. Les institutions et les communautés religieuses ont le droit de se développer sans entrave. Elles sont dégagées de la tutelle de l’Etat. Elles règlent et administrent leurs affaires d’une manière autonome. »

Je partage cet avis du recteur Thierno Madany Sy dans son analyse de l’application du concept de laïcité au Sénégal : « la neutralité religieuse de l’Etat s’interprète comme donnant libre cours au développement sans entraves des Institutions et Communautés religieuses. » 

En effet, à l’analyse, on distingue très clairement les différences majeures entre la laïcité à la française et la version du principe laïque choisie dans notre pays. Non seulement l’Etat sénégalais n’ignore pas les religions, mais entretient des relations normales et très étroites avec les Confréries musulmanes et le clergé catholique, y compris à travers le programme d’investissements annuel dans les cités religieuses et inscrits dans la programmation budgétaire annuelle de l’Etat.

Et en fonctionnement, les subventions aux écoles privées catholiques constituent une part importante des financements de l’éducation. Les écoles privées catholiques, comme les autres non confessionnelles, sont considérées comme membres à part entière du service public de l’Education.

Il faudrait être sourd et aveugle, pour ne pas saisir la part extrêmement importante que prennent, dans les programmes des radios et télévisions, les cérémonies et autres manifestations religieuses.

Et lors des différentes commémorations religieuses (confrériques et catholique) l’Etat en grand apparat et de façon solennelle est présent.

En conclusion, il me semble que la question qui est au cœur des agitations et des polémiques sur la laïcité au Sénégal, est celle de la nature de notre Etat-nation, celle que ses bâtisseurs nous ont léguée. C’est celle de notre récit national.  Quelle narration notre nation renvoie-t-elle aux citoyens que nous sommes ? Quelles sont ses valeurs essentielles à transmettre ?

En 1959, Senghor (Nation et voie africaine du socialisme. Présence africaine) en donnait un aperçu : « la Patrie, c’est le pays sérère, le pays malinké, le pays sonrhaï, le mossi, le baoulé, le fon. […] Loin de renier les réalités de la patrie, la Nation s’y appuiera, plus précisément elle s’appuiera sur leurs vertus, leur caractère de réalités, partant sur leur force émotionnelle. […] Au terme de sa réalisation, la Nation fait, de provinces différentes, un ensemble harmonieux. […]  Nous prendrons garde à ne pas tomber dans l’une des tentations de l’État-nation, qui est l’uniformisation des personnes à travers les patries »

Je pense que la laïcité ou le sécularisme de la République permet le déploiement d’une histoire nationale pleinement africaine qui s’appuie sur la diversité de notre peuple, de ses terroirs, de ses langues et des valeurs qu’elles véhiculent. En somme, accepter de continuer à s’enrichir de « l’humanisme soudanais » pour reprendre l’expression de l’historien Sékéné Mody Sissokho.

Le Brésil est de retour

Instantanés.

Leçons du Brésil

L’élection de Lula, confirmée par le tribunal électoral est une formidable nouvelle pour le Brésil d’abord, bien sûr, mais aussi un espoir pour tous ceux qui pensent que la République est le meilleur des régimes et le suffrage universel, un homme ou une femme, une voix le seul moyen d’y parvenir.

La vraie question à se poser est celle de savoir, comment l’extrême droite a pu récolter autant de voix, après les milliers de morts du Covid qu’a entrainé sa politique criminelle de déni, de la violence armée contre les pauvres et du massacre des forêts en Amazonie.

Le Parti des Travailleurs, né au début des années 80, salué par la gauche internationaliste comme les premiers pas du réveil des classes laborieuses brésiliennes, longtemps à l’écart des mobilisations populaires en Amérique latine, a fait basculer les rapports de force politique sur ce continent et ailleurs.

Mais la gestion luliste au pouvoir deux mandats durant, suivis des deux mandats (dont le dernier interrompu par une procédure de destitution) de Dilma Roussef, a été erratique, émaillée de scandales de corruption et de compromissions avec la droite réactionnaire. Malgré d’indéniables progrès sociaux dont cet énorme chiffre de 40 millions de brésiliens sortis de la pauvreté, grâce à la création massive d’emplois et la mise en place des bourses familiales (bolsa familia) et des avancées démocratiques réelles.

Ce sont ces dérives qui ont détourné l’électorat populaire de la coalition de gauche, et par ricochet l’ont jeté dans les bras du populisme d’extrême droite, couvé par les armées d’évangélistes « fous de Dieu ».

Les leçons du retour de Lula au pouvoir pour les républicains et les militants de gauche, ce sont les politiques résolues de lutte contre les inégalités économiques comme composantes centrales d’un projet de république sociale. Ce sont aussi, la gestion sobre et altruiste des débuts de mandat de Lula, la démocratie participative associant les populations aux décisions majeures les concernant.

Bref en revenir à ce qui en faisait la force du candidat Lula pour toute la gauche : « Brésil le pays de tous, ou un pays pour tous ».

« Votre fatwa ne s’appliquera jamais ici ».

Wole Soyinka devait se rendre à Nairobi – au moment même où avait lieu l’attaque du centre commercial Westgate – pour un festival de littérature. L’un de ses amis qui, y a assisté, est mort.
Le Prix Nobel nigérian lui rend un hommage poignant dans cette tribune contre le terrorisme. Le Pr Wole Soyinka est lauréat du prix Nobel de littérature 1986. Il a prononcé cet hommage lors d’une conférence réunissant des écrivains nigérians à Lagos.

Sources: Premium Times (Abuja 4 novembre 2013)

Jamais, depuis l’apartheid, notre humanité n’a subi de telles pressions et n’a eu à relever des défis aussi intenses et persistants. L’histoire se répète. Encore une fois, une minorité d’assassins se prétend supérieure à tous les autres, s’arroge le pouvoir de dicter aux autres, son mode de vie, décide qui pourra vivre et qui devra mourir, ou qui fera la loi et qui devra s’y soumettre. L’islam, la religion dans laquelle [les terroristes] se drapent, n’est qu’une couverture. 
Le vrai problème réside, comme toujours, dans le pouvoir et la soumission, avec ici comme instrument le terrorisme. Regardons avec objectivité la vraie nature de la domination qu’ils cherchent à nous imposer, nous qui vivons prétendument dans des “lieux de vice et de débauche, d’impureté et de décadence”. Nul besoin de chercher très loin. Leurs modèles se trouvent tout près de nous. Dans une Somalie chaudement disputée. Dans un Mali récemment libéré. Par intermittence, en Mauritanie. Dans une Algérie enchaînée pendant des années de troubles, elle qui tente encore de restaurer une fragile entreprise de laïcisation. Leur modèle consiste donc à instaurer l’exclusion. Mais aussi l’irrationalité et les restrictions dans la vie quotidienne. Le mépris de la culture et du pluralisme. L’établissement d’un apartheid sexiste. La diabolisation de la différence. C’est le règne de la peur. 
Infidèles 
Nous avons remporté une victoire en abolissant l’apartheid, afin que la race ne soit plus un critère de citoyenneté. Réaffirmons notre refus, sur notre continent, que la religion soit établie comme une seconde nature humaine, indiquée sur nos documents d’identité, et de laquelle déprendrait notre nationalité, mais également le droit même d’exister sur la planète. 
J’ai envie de croire que nous étions tous présents à Nairobi*. Dans un rassemblement de l’humanité, nous étions présents aux côtés de toutes les victimes mutilées et décédées. Nous étions aux côtés de Kofi Awoonor [poète ghanéen, ami de Soyinka, mort dans l’attentat du centre commercial Westgate], l’un des plus distingués d’entre nous, l’un des meilleurs écrivains africains à nous représenter à l’étranger. Nous étions présents au Mali avant même que ce pays ne s’unisse pour repousser la vague d’atavisme religieux et la régression humaine qu’il entraîne. Nous étions aux côtés des étudiants de Kaduna, des victimes de l’Etat du Plateau [cet Etat, avec sa capitale, Jos, située à la lisière du Nord musulman et du Sud chrétien, a connu des affrontements qui ont coûté la vie à près d’un millier de personnes en deux jours seulement, en novembre 2011], de Borno [Etat musulman du nord du pays], des écoliers de Yobe, des conducteurs d’okadas (moto-taxis) et des petits marchands de Kano [mégalopole du nord], aux côtés de tous ceux qui ont été systématiquement massacrés depuis tant d’années [tous ont été le théâtre d’attentats perpétré par le groupe islamiste Boko Haram au Nigéria]. 
Les victimes du centre commercial de Nairobi ont été soumises au même test diabolique que celui administré aux élèves de Kano [fin septembre, une quarantaine d’étudiants ont été assassinés au nord du Nigéria] : ceux qui ne réussissaient pas à réciter le verset demandé du Coran étaient considérés comme des infidèles, et emmenés pour se faire égorger méthodiquement. 
Nous, écrivains, avons été présents dans les épreuves traversées par l’Algérie, consignées pour la postérité par Karima Bennoune dans son livre Your Fatwa Does Not Apply Here (« Votre fatwa ne s’applique pas ici” ; pas traduit en français). Nous étions aux côtés de Tahar Djaout, auteur du Dernier Eté de la raison (éd. du Seuil, Paris, 1999), lui aussi assassiné par des fanatiques religieux. Nous sommes de simples survivants qui ne cessons de demander : quand tout cela s’arrêtera ? Comment tout cela se terminera ? Ceux qui font écho à Karima et à cette miraculeuse survivante qu’est Malala [cette jeune Pakistanaise défend le droit des filles à l’éducation], tous clament ensemble : non, votre fatwa ne s’appliquera jamais ici. 
Nous continuons à demeurer auprès de tous ceux qui sont tombés, auprès de vos victimes du fléau de votre sectarisme, de votre solipsisme [théorie pour laquelle il n’y aurait pour le sujet pensant d’autre réalité que la sienne] religieux et de votre spiritualité toxique. Nous continuerons à rester à leurs côtés, à dénoncer et à condamner. Nous nous sommes rangés dans le camp de l’humanité, face à ceux qui s’opposent à elle. 

Nous pleurons Kofi Awoonor, notre collègue, notre frère, mais avant tout nous dénonçons ses assassins, cette virulente sous-espèce humaine qui se lave les mains dans le sang des innocents. 
Scalp 
Seuls les lâches tournent leurs armes meurtrières contre ceux qui sont désarmés, seuls les pervers glorifient cet acte ou le justifient. Les vrais combattants ne mènent pas la guerre contre des innocents. On ne peut que qualifier d’obscène la profanation de la vie humaine. Elle est sacrée. 
Nous lançons cet appel à ceux qui veulent instaurer la fatwa, avec tout le poids moral qui s’y attache, à ceux qui violent le droit à la vie. La vie est un don de Dieu, y porter atteinte est un sacrilège. Ils ont ajouté le scalp de notre collègue à leur collection, un intellectuel exceptionnel qu’un million d’êtres de leur espèce ne pourront jamais remplacer. 
Nous saluons le courage et les sacrifices des soldats qui se battent pour que ces intrus – Al-Qaida et autres –, avec leurs arrogants desseins, ne puissent anéantir les libertés et la tolérance. Elles sont notre identité dans la région, et sur le continent tout entier. Nous ne devons jamais nous dérober pour reconnaître cette cruelle réalité. 
Aujourd’hui, j’exhorte toutes les forces du progrès à reconquérir l’Afrique ! A la sauver des mains de ces forces obscures qui cherchent à instaurer un nouveau régime de despotisme religieux, de cruauté comme nos peuples n’en ont jamais connu, même sous le joug du colonialisme européen. Ces bouchers continuent à évoquer l’islam, aussi nous en appelons à nos confrères et consœurs [musulmans] : reprenez votre islam. Reprenez cet islam qui se réclame d’une culture du savoir, honore ses fidèles comme le “peuple du Livre”, un islam de partisans historiques des vertus de l’intelligence et de ses produits. Ce que la tragédie de Nairobi nous apprend, c’est qu’il n’existe aucun endroit appelé “Ailleurs”. L’ailleurs est ici, parmi nous, dans le présent. Je vous invite donc à remplir cette mission : reconquérir l’islam, reconquérir notre continent et, ainsi, reconquérir notre humanité.

Charlie or not Charlie.

OUI IL FALLAIT MARCHER LE 11 MARS A PARIS

Publié le 19 janvier 2015 (Enquête plus quotidien)

Le président Macky SALL a eu raison de marcher le dimanche 11 mars à Paris. 

Comme nous tous, des centaines, ou peut-être des milliers de sénégalais d’origine à travers toute la France.

A Paris, nous avons marché de la colonne de la République à Nation. 

Le président Macky ne l’a certainement pas vu, mais sur la colonne avec la statue représentant Marianne, un jeune homme d’origine sénégalaise agitait un drapeau aux couleurs de notre pays. 

Quelle fierté, pour ceux qui, comme moi débouchant de la rue Turbigo à l’angle de la rue du Temple voyait ce drapeau à bandes verte, or, rouge, verticales et égales et une étoile verte à cinq branches sur la bande jaune, parmi les dizaines d’autres portés par des jeunes de toutes origines et de toutes les couleurs.

Il s’est passé ce jour-là, ce qui se passe quand des milliers, des millions de personnes se mettent en marche sur une simple idée, défendre l’essentiel, au fond notre qualité de citoyen, consubstantiel à notre LIBERTE absolue de penser et d’agir.

Pour ceux qui connaissent Paris, ce monument inauguré le 14 juillet 1883 est entouré de trois statues en pierre chacune représentant l’allégorie de la devise française de la Liberté, Egalité, Fraternité.

Toutes les manifestations républicaines dans Paris, finissent ou partent de cette place ou de la Bastille.

Oui, nous y étions et nous étions nombreux, les Sénégalais de France, ou d’ailleurs en Europe fiers de défiler et de manifester pour cette cause qui dépasse nos propres personnes, celle de la LIBERTE.

Le 11 janvier dans les rues de Paris, de quoi était-il question ?

Pas une seule banderole, contre l’Islam, le christianisme, le judaïsme. 

Pas une banderole xénophobe ou d’extrême droite, réclamant le départ des musulmans de France. Mais des banderoles, disant simplement : je suis Charlie, je suis musulman, je suis juif, je suis noir…  Il n’était pas question de foi, de religion, mais de LIBERTE.

Et notre foi, de toute façon plus forte qu’un dessin, une caricature. La foi de ceux qui sont offusqués par une caricature doit d’ailleurs être bien fragile, pour se sentir ébranlée par ces quelques pages éphémères.

La laïcité nous permet de vivre notre foi et notre religion, l’Islam en l’occurrence ici dans ce pays qui dans son histoire, a pendu des prêtres, démoli des églises et interdit la condamnation du blasphème en 1830 (sauf en Alsace-Moselle en vigueur jusqu’au 22 décembre 2015= Concordat) alors que jusqu’à la Révolution française en 1789 elle était passible de condamnation à mort. 

Nous n’avons à demander à personne le droit à vivre notre foi et notre religion et de comment la vivre, mais n’avons pas non le droit d’imposer à qui que ce soit, notre façon de vivre notre foi et notre religion.

C’est de cela dont il était question dans cette manifestation.

Et nous savons que la bande d’assassins qui a sévi à Charlie Hebdo et dans l’épicerie casher, sont les mêmes que Boko Haram, Mujao, Aqmi qui fracassent les tombeaux des saints à Tombouctou, en Irak, au Pakistan et massacrent les populations musulmanes sous prétexte que c’est eux qui doivent décider de ce qui est licite ou illicite au nom d’une vision étriquée, ignare et intolérante de l’Islam.

J’ai été enchanté de lire l’article de Fadel Dia dans Sud online du 13 janvier. « Ce qu’on a tué chez Charlie et la Porte de Vincennes, dépasse l’existence de quelques individus, ce sont la liberté, le droit à l’expression, les fondements mêmes d’une société respectueuse de la nature humaine ».

Wolé Soyinka, a écrit en septembre 2013, après les attentats horribles qui ont ensanglanté Nairobi :

« Nous avons remporté une victoire en abolissant l’apartheid, afin que la race ne soit plus un critère de citoyenneté. Réaffirmons notre refus, sur notre continent, que la religion soit établie comme une seconde nature humaine, indiquée sur nos documents d’identité, et de laquelle dépendrait notre nationalité, mais également le droit même d’exister sur la planète.  J’ai envie de croire que nous étions tous présents à Nairobi. Nous nous sommes rangés dans le camp de l’humanité, face à ceux qui s’opposent à elle. »

Le président Macky SALL a eu mille fois raisons d’être à Paris ce jour-là, où l’histoire s’écrivait dans la rue, avec le refus de millions d’hommes et de femmes de se plier aux diktats de ces assassins, qui sévissent au Mali, au Nord du Nigéria, à Mogadiscio, au Pakistan.

Cette histoire est mondiale, comme l’Histoire est celle de notre humanité commune. 

Qui peut croire que ce qui se déroule tous les jours, en Syrie, en Irak, au Nigéria ne sera pas à nos portes demain.

Ce n’est pas la faiblesse coupable, pour ne pas dire complice de certains qui les en empêchera.

L’armée la plus forte du continent est en déroute tous les jours devant ces hordes de sanguinaires armées jusqu’aux dents par les wahhabites qui les ont nourris et devant lesquels nous avons tous été aveugles.

Abdoul Aziz Kébé dans une interview à Sud en octobre 2012 déclarait « Le Sénégal ne peut pas être un îlot non influencé par ce qui se passe aux alentours. Des associations islamistes sont déjà là et se nourrissent de cette sève intégriste. Elles ont des écoles et même, apprend-on, une faculté, dans certains quartiers de la capitale et de la banlieue. »  

Qui ne le voit à la Médina, de la rue 1 à la rue 37, à Guédiawaye ou Parcelles, le danger intégriste s’affiche et nous défie dans ce que ce merveilleux pays a de plus important au monde : le sentiment de liberté des Sénégalais.

Ne nous y trompons pas, si les troupes françaises puis celles de la CDEAO ensuite n’étaient pas intervenues au Mali, le MUJAO, AQMI et leurs affidés étaient sur Kayes et fondaient sur le Sénégal oriental en quelques semaines.

Je ne peux imaginer l’espèce de clown sanguinaire démoniaque d’Abubakar Shekau chef de Boko

Haram se proclamer émir du Sahel avec Dakar comme capitale. Un cauchemar pour tous

La dérive d’un homme

Je viens de tomber sur l’article de Malick Ndiaye, publié sur le site de Xalima.com le 13 janvier au nom du « cercle des intellectuels-CIIS ».

C’est un torchon indigeste, insipide, indigeste, baveux de prétention et surtout dangereusement mal intentionné.

Et je ne peux m’empêcher d’être triste devant la dérive d’un homme que j’ai connu jadis.

Que nous dit ce « sociologue professeur à l’université de Dakar » ?

Que le Sénégal « soit une république de croyants » en convoquant à l’appui de sa diatribe contre le président Macky SALL, tous nos saints hommes et personne n’y manque, sauf peut-être Ndiadiane Ndiaye et Alboury Ndiaye. 

Je me suis pincé pour croire ce que je lisais, connaissant de longue date, cet ex-compagnon de route de la gauche internationaliste française.

Substituer croyants et citoyens est un contresens théorique et politique grave, à moins que cela ne soit à dessein. 

Une république de croyants est une théocratie : l’Iran en est un exemple contemporain ou le Vatican (le pouvoir du Pape repose sur son infaillibilité supposée). 

L’idéal du califat auquel se réfèrent les jihadistes pourrait aussi constituer ce modèle.

Une république de croyants n’est pas une république, parce que la source de la loi est d’ordre divin et donc transcendantal et en Iran la source d’inspiration est le guide (un Marja c’est-à-dire « source d’imitation » ou « source de tradition »).

En République la source de la loi ce sont les citoyens libres. 

La foi de chacun étant d’ordre privé et l’espace public est neutre pour que toutes les croyances puissent cohabiter.  

Le président Abdou DIOUF, dans ses mémoires, parle du travail d’orfèvre, que les compagnons de Senghor et lui-même, ont fait dans la période postindépendance pour maintenir le caractère laïc de l’Etat.

Si les mots ont un sens et Malick Ndiaye un « sociologue », que ne nous dit-il pas ?

Après avoir conseillé le président Diouf, le président Wade, le président Sall et après des pérégrinations à Bouaké, auprès des ex-Forces Nouvelles, ensuite auprès du président Gbagbo il y a quelques années, voilà notre « animateur du cercle des intellectuels » prêt à enfourcher d’autres combats. 

Les dérives de notre « Le sociologue » de l’UCAD, animateur du « cercle des intellectuels » Malick Ndiaye n’auraient pas de bornes.

Mais il est vrai que dans ce salmigondis indigeste, il dit qu’il est à la fois contre « l’intégrisme démocratique euro-américain judéo chrétien (sic et resic) » et contre le « l’intégrisme monocratique d’inspiration islamique ». J’avoue qu’à cette étape de ma lecture j’étais un peu perdu. Et je me suis dit comme sans doute d’autres qui l’ont lu : « qi wër na ! »

La suite de cet article est encore plus grave. 

Il dit que nous avons (et en majuscule svp) manifesté « pour la Défense des Droits à la Caricature du Sceau des Prophètes et à la Protection des Libertés des Caricaturistes du Prophète Mahomet (PSL) ».

Que cherche cet homme ? 

Vouer aux gémonies et à une prochaine fatwa des ignares sanguinaires le président et ceux qui ont défilé le 11 mars ?

Les faire condamner à la flagellation publique de 100 coups de fouets ?

Et pour finir notre « sociologue » ressuscite le Protocole des Sages de Sion et éructe sur les lobbies judéo-maçonniques et Sionistes qui combattent les religions abrahamiques ? 

Sans doute là excluent-ils les juifs de ce groupe. 

Ses vieux compagnons de route de la gauche internationaliste, formés aux mêmes références idéologiques, et qu’il fréquente peut-être encore doivent aussi se pincer.

Ingratitude d’un homme, arrivé à un certain âge, pour oublier tous ceux avec qui il a cheminé dans ces longues années de militantisme pour la liberté et la fraternité des peuples sous le froid et la grisaille des hivers parisiens.

A tant de perfidie et tant d’ingratitude !

Le protocole des sages de Sion est un faux grossier qui se présente comme un plan de conquête du monde établi par les juifs et les francs-maçons fabriqué par les services secrets du Tsar de Russie au début du 20ème siècle contre les militants républicains qui luttaient pour l’abolition du tsarisme. 

C’est devenu depuis longtemps la bible des « complotistes » de tous poils. 

Ceux qui pensent que le 11 septembre n’a jamais eu lieu. 

Ceux qui pensent qu’un centre mondial « d’Illuminati » et de francs-maçons est à l’œuvre partout.

Notre « sociologue de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar » devrait arrêter de lire DA VINCI CODE de Dan Brown 

Pathétique et lamentable référence. 

Pour ma part, je choisis la LIBERTE de ne pas lire Charlie HEBDO quand il caricature le prophète Mahomet (PSL), d’inviter ceux que je connais et qui respectent ma foi à en faire de même. 

Parce que j’ai la LIBERTE de le faire.

Je choisis la LIBERTE contre BOKO HARAM, AQMI et DAESH qui massacrent des musulmans qui célèbrent l’Achoura en Irak chaque année, contre les talibans pakistanais qui massacrent des musulmans soufis parce qu’ils honorent leurs saints comme nous au Sénégal.

Soyons en sûrs, si nous ne faisons rien contre ces wahhabites, qui sont déjà chez nous, fanatiques sanguinaires et leurs épigones demain ils seront suffisamment forts pour demander l’interdiction du Magal de Touba et du Gamou de Tivaouane. Ils considèrent ces manifestations de foi comme hérétiques. 

Monsieur le président vous avez eu raison de manifester le 11 janvier à Paris. Et nous étions 4 millions avec vous, noirs et blancs, jeunes et vieux, femmes et hommes et de toutes les religions.

De quel côté êtes-vous « M. le sociologue de l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar » animateur du « cercle des intellectuels ».

 Babacar FALL